Elles sont pour les laboratoires le nouveau Graal, la source de bien-être de demain. Pleines de qualités, les algues alimentent autant la diététique que la cosmétique. En phase avec la nature et la modernité, il ne leur manquait que le glamour. Il arrive.
Depuis que le New York Times a publié la recette de l'unicorn latte vendu à Williamsburg, Instagram pullule de clichés de ce smoothie coloré ultraphotogénique. Et à quoi est dû ce drôle de bleu ? A la microalgue qu'il contient, appelée spiruline. Pressée à froid, additionnée de noix de cajou, gingembre, dattes, jus de citron, cette boisson healthy est "parfaite après une séance de méditation" (sic). Ne levez pas les yeux au ciel, c'est le signe que cette micro-algue est officiellement en train de devenir glamour. La preuve, ces breuvages pastel ont même traversé l'Atlantique : on les consomme dans le très cool café végétarien Palm Vaults, situé dans l'East London. Et ce n'est que la partie émergée de l'incroyable popularité de cette spiruline. Ce "soja de la mer", comme on le nomme aujourd'hui, contient un taux de protéines exceptionnel, qui en fait un ingrédient vegan marin remplaçant du poisson.
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Faut-il y succomber?
"L'engouement est justifié, concède la nutritionniste Valérie Espinasse. La spiruline est également riche en minéraux, et notamment en fer, qui constitue une alternative aux multivitamines synthétiques mal absorbées par l'intestin. Dans les programmes détox, j'intègre également la chlorelle, une autre algue de rivière. Les deux neutralisent les toxines et stimulent l'activité de drainage. Elles apportent de l'oxygène aux tissus et permettent une meilleure régénération." Bref, ce sont de véritables alliées santé qui ouvrent l'appétit... de l'industrie alimentaire et cosmétique. En toute simplicité, la société Polaris, basée à Quimper, qualifie sa nouvelle huile d'algue anti-âge de "green oil of the future". Phénomène significatif, les sociétés productrices d'algues se font racheter par les grands groupes de production de matières premières. Algues & Mer a été acquise fin 2016 par le géant Solabia, et Solazyme, un producteur de microalgues pour les biocarburants, vient de signer un contrat de 200 millions de dollars avec Unilever pour produire des huiles d'algues durables.
Certes, le fait d'utiliser les algues pour préserver sa santé ne date pas d'hier : les Romains en faisaient déjà état. Côté français, on les a redécouvertes au milieu du XIXe siècle, en pleine révolution industrielle ; les malades contaminés par la pollution de l'air contenant des particules de charbon étaient alors envoyés en cure de thalasso. Mais, depuis, seules quelques marques ultra-spécialisées, pas toujours désirables pour les consommatrices de moins de 30 ans, valorisaient leurs bénéfices. Pour les autres, les algues étaient des ingrédients cachés au fond des formules, rarement un argument de vente.
"En Europe, on les a longtemps utilisées pour le fourrage des animaux, comme un matériau avec peu de potentiel, déplore Eric Bordron, PDG de la marque Algologie, un laboratoire de cosmétiques marins. On exploitait aussi leur qualité d'épaississant, par exemple dans les yaourts (sous le non d'alginates)." Il était temps qu'elles gagnent leurs lettres de noblesse et que leur champ d'action ne se limite plus aux marques spécialisées dans les actifs marins. Ultime consécration : Glossier, la marque beauté la plus cool du moment, créée par la blogueuse new-yorkaise Emilie Weiss, vient de lancer une crème anti-âge (disponible uniquement aux Etats-Unis) contenant un extrait d'algue rouge.
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